Le premier souvenir de ce match-là, ce mythique RFA-France à Séville (3-3, 5 tab à 4), c'est avant tout une image. Celle de Patrick Battiston gisant au sol, après avoir été violemment percuté par Harald Schumacher, à l'approche de l'heure de jeu (57e). On aurait pu se rappeler aussi du formidable but de "Gigi" (Alain Giresse), dans la prolongation, qui donnait alors deux buts d'avance aux Bleus et quasiment une place en finale. On aurait pu mettre en avant la séance de tirs au but, terrible également dans son déroulement et toujours aussi cruelle. Ou encore saluer la performance de Marius Trésor, à la fois libéro d'une défense aux abois en fin de rencontre et buteur de l'espoir. Mais le fait marquant de ce moment à jamais gravé dans l'histoire de l'équipe de France reste bien cet attentat perpétré par le gardien allemand. A tel point qu'à l'époque, les dirigeants français et allemand, François Mitterrand et Helmut Kohl, avaient été contraints de rédiger un texte commun pour apaiser les esprits. Trente ans après, personne n'a oublié. Surtout pas l'intéressé.
Cette action l'a même marqué à vie.«On m'a traité de nazi, j'ai reçu des menaces de mort. Mes enfants ont aussi été menacés. J'en ai souffert», expliquait Schumacher en février dernier au Figaro. Lorsqu'il sort les deux pieds en avant en direction du Stéphanois, le portier de Cologne ne se doute alors pas un seul instant de l'impact de son geste incensé. «Je ne souhaitais pas le blesser. Mais je ferais la même sortie si l'action devait se reproduire, avouait-il encore il y a quelques semaines. C'était le seul moyen d'avoir la balle». Entré quelques minutes auparavant, au milieu lui l'attaquant, Battiston ne sera resté que dix minutes sur le terrain, le temps de remplacer Bernard Genghini, d'effectuer cet appel en profondeur plein axe et d'être retourné sur place comme une vulgaire crêpe par un boucher allemand. «L'arbitre ne nous a pas aidés. Non seulement il y a faute et blessure sur Battiston, mais l'arbitre ne siffle rien et ne met pas de carton»,regrette encore aujourd'hui Michel Hidalgo, le sélectionneur tricolore d'alors.
L'arbitre n'a «pas vu la violente collision»
L'arbitre justement, le Néerlandais Charles Corver, a reconnu après coup son erreur. «Je n'ai hélas pas vu la violente collision car je suivais le ballon, qui est allé juste à côté du but, explique-t-il trois décennies plus tard. J'ai tout de suite demandé à mon arbitre assistant ce qu'il avait vu et il m'a dit, qu'à son avis, ce n'était pas intentionnel. Dès lors, je ne pouvais plus rien faire. Hélas, il n'était pas possible de visionner les images sur un écran. Naturellement, j'ai beaucoup regretté par la suite que la France ait perdu après avoir mené 3-1. On m'en a imputé la faute». En voyant la victime inconsciente, évacuée sur une civière aux côtés de son pote Platini et la main figée comme si le temps s'était d'un seul coup arrêté, Schumacher n'est même pas venu s'excuser. «Je voulais le faire sans public. Sur terrain neutre, comme une aire d'autoroute», plaisante-t-il maintenant qu'il sait Battiston hors de danger, avant d'ajouter avec un poil de remords : «Je regrette tout ce qui s'est passé (...), mais je me disais alors que si je m'approchais les choses pouvaient dégénérer». Avec le temps, l'image est toujours aussi choquante. Celle de Schumacher ne s'est pas arrangée. - H.S. (Avec AFP)
L´equipe
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